Donc en résumé je continue à rêver...(partie 2)

19.02.2014

(Suite de l'article)

Rédaction de l’avant-papier : Rachel Masurel, Margot Leydet-Guibard, Laura Seaux, Sébastien Milon, Gala Moreau, Ivana Raibaud.

Le spectacle en 3 points

Nous verrons que le spectacle est bâti autour de la relation entre le corps et la parole. Le lien entre ces espaces privilégiés d’expression est interrogé par les comédiens, d’autant plus qu’il dépend profondément des différentes cultures et mène à la question de la rencontre, possible ou impossible, entre des personnes, entre des altérités. Mise en scène, en mots, en mouvement, la relation entre les personnes traite du désir de chacun, de nos désirs. Serait-ce, profondément, la recherche du bonheur ?

Dans ce spectacle, le corps semble parler plus que les mots. L’indicible transparait au travers des mouvements. Dans cette scène, tout l’enfermement du comédien sur lui-même est rendu sans un mot, simplement par cette bande de scotch noire qu’il fixe, comme infranchissable, autour de lui (Cf photo ci-dessus). Ensuite, il se met à danser au centre du carré formé et la danse cubaine qu’il accomplit symbolise la barrière de la rencontre. Les gestes en disent souvent plus que les mots.

La rencontre

Sur le plateau, trois comédiens dans un espace vierge, anonyme. À propos de cela, Peter Brook écrit dans L’espace vide : « Le but n’est pas d’éviter l’illusion : tout est illusion. Mais certaines choses semblent plus illusoires que d’autres. […] En revanche, l’illusion faite d’éclairs et d’impressions fugitives maintient en éveil l’acuité de notre imagination" . Laisser la scénographie vierge permet au spectateur de se représenter soi-même, de penser sa propre mise en scène, de laisser libre cours à son imagination.

Ces trois personnages, « Elle, lui et celui qui danse » cherchent le partage, l’échange, ils veulent s’exprimer. À travers plusieurs témoignages et le jeu d’acteur, se révèlent à nos yeux, deux personnages proches et un étranger de Cuba, plus à l’écart. Ils parlent de leurs désirs, de leurs envies et ambitions, de leurs mal-être, de leurs difficultés à comprendre l’Autre et donc indirectement de leurs rapports à la société.

Les personnages font des tentatives de rencontre corporelles comme lorsque les trois personnages arrivent à courir dans la même direction, de profil, et alignés (Cf photo ci-dessous).

(c) Guy Labadens / Cie des Songes

La recherche du bonheur

« Je voudrais juste sortir, je ne sais pas, aller voir les Pyramides » Lui

« L’impossible-possible » relation amène chaque personnage à tenter de s’exprimer sur le bonheur qu’il recherche pour lui-même.

Photo : Guy Labadens / ©Cie des Songes

Chacun des personnages cherche à vivre autrement, à s’évader, à concrétiser son rêve. Le cubain cherche à découvrir la neige qu’il n’a jamais vue. L’européenne voit finalement son bonheur dans la forêt (elle qui travaillait dans le social et cherchait vainement l’entraide) et l’européen finit par comprendre que son bonheur, c’est de rester là, c’est-à-dire qu’il peut être heureux à tout moment où qu’il soit, il n’a pas besoin de partir loin pour être heureux (alors qu’il n’avait de cesse d’essayer de voyager). Le bonheur, est-ce alors ce qu’on ne connaît pas ? Le trouve-t-on dans l’opposé de ce qu’on est / ce qu’on a ? Et est-il possible (en prenant le cas du français) de se tromper de bonheur ? Finalement, on peut se questionner sur le titre de l’œuvre : est-il question dans ce spectacle de rêves de bonheurs épars ? Quelle est la place du rêve ? Le bonheur n’est-il qu’un rêve ?

La diversité des propositions de ce spectacle allie la danse à des moments immobiles, la parole ou la musique qui accompagne la danse au silence, le jeu évocateur des acteurs à une scénographie épurée, le propos du témoignage à une réflexion philosophique. À la croisée de deux cultures différentes, cubaine et française, la compagnie s’est interrogée sur la relation entre le corps et le langage.

Alors que les corps semblent parler plus que les mots, germe la question de la rencontre avec l’autre, dans la diversité des relations entre les personnages, dans l’altérité. « Impossible/possible » relation qui amène chacun à tenter de s’exprimer sur le bonheur qu’il recherche pour lui-même. Mais qu’est-ce que le bonheur ?

Cette création apparait alors comme une démarche originale qui peut dérouter toutefois. Quoi qu'il en soit, elle met en scène des désirs, et le public reste, pour la durée d’un spectacle, emporté dans ses rêves, comme l’exprime Bruno Lecomte, directeur du Glob : « je continue à rêver de la Compagnie des Songes [qui est] très onirique et inclassable, très beckettien. ».

Sources

- ELUARD Jean-Luc, La découverte de l’Amérique (article), journal Sud Ouest, le 11 février 2014 : http://www.sudouest.fr/2014/02/11/la-decouverte-de-l-amerique-1458219-2780.php

- http://www.cdsonges.com/

- http://oara.fr/residences/donc-en-resume-je-continue-rever-0

- http://www.cdsonges.com/photo-2193570-Photos--donc-en-resume--je-.-4498-copie_jpg.html#start

- http://autenticacuba.com/fr/evenments/#axzz2thqCzOMH

- http://amnesty.org/fr/for-media/...create-climate-fear-cuba-2010-06-30

- http://www.theatre-contemporain.net/biographies/Thibault-Lebert/presentation/

Pour aller plus loin …

Quelques mots sur le festival des Translatines : http://theatre-des-chimeres.com/wordpress/les-translatines/translatines-2013/

Emission « Bouge de là » du mardi 4 février 2014 sur 2.0 radio (interview de Lauriane Chamming’s et Thibault Lebert) : http://g-informatique33.fr/o2replay/audio/mardi/mardi_13h-14h.mp3

Article Sud Ouest rédigé par Pierre Pénin – Mouvements vers l’autre (14 octobre 2013) : http://www.sudouest.fr/2013/10/14/mouvements-vers-l-autre-1198248-3944.php

[1] Citation extraite du site de la Compagnie des Songes : http://www.cdsonges.com/pages/Fil_rouge-5863558.html.

[2] Site : http://autenticacuba.com/fr/evenments/#axzz2thqCzOMH

Rédaction de l’avant-papier : Rachel Masurel, Margot Leydet-Guibard, Laura Seaux, Sébastien Milon, Gala Moreau, Ivana Raibaud.