Le "krinomen" est un débat critique qui regroupe les étudiants d'Arts du spectacle (théâtre et danse) de l'Université Bordeaux Montaigne, de la Licence 1 au Master 2. Ce blog constitue un support d'informations sur les spectacles vus pendant l'année, ainsi que le lieu de publication d'une partie des travaux réalisés en TD de critique (critiques de spectacles, entretiens...).
Spectacle présenté aux Colonnes de Blanquefort le mardi 24 janvier 2012
« Que se passerait-il si, après leurs conférences de presse, les hommes politiques se devaient de danser leurs discours? »
© Victor Ede
Autour des artistes :
Je suis venue est une pièce mêlant danse et théâtre écrite par Gaspard Delanoë, comédien et fondateur de plusieurs collectifs d’artistes évoluant dans le domaine des arts plastiques. Né en 1968, il a d’abord obtenu un master d’anglais avant de réaliser de nombreuses performances de rue. En 2002 il crée un parti politique fantaisiste, le Parti Faire un Tour, avec lequel il s’est présenté aux municipales de Paris en 2008, ainsi qu’aux présidentielles de 2012.
Dans ce spectacle, il joue au côté de la danseuse Libanaise, Yalda Younes. Née en 1978 à Beyrouth, sa mère l’initie au classique dès son enfance. Elle suivra des études de cinéma avant de se consacrer entièrement à la danse et notamment au flamenco auprès de Israel Galván, chorégraphe de Je suis venue.
Considéré comme « le Nijinski du flamenco » (d’après le dossier de présentation), Israel Galván, chorégraphe et danseur, mêle dans ses pièces, danse contemporaine et flamenco traditionnel. Né à Séville de parents danseurs de flamenco, c’est tout naturellement qu’il s’intéresse à cet art dès son plus jeune âge. Il participe à de nombreux concours et remporte souvent des prix, comme le prix national de Danse. Sa dernière création avant Je suis venue a remporté un grand succès lors du festival Montpellier Danse et du festival d’Avignon.
Le Festival des souris, des hommes #5 :
Chaque année depuis 2008, est organisé ce festival des arts vivants et des nouvelles technologies. Cette cinquième édition qui a commencé le 17 janvier dernier et qui s’achèvera dans quelques jours, présente durant trois semaines des spectacles innovants et hybrides qui promeuvent la transversalité des arts. C’est aussi l’occasion de voir ou de découvrir des artistes européens de référence ainsi que les nouveaux artistes de la région. C’est dans ce cadre qu’a été remonté le spectacle Je suis venue, créé depuis 2010, où se mêlent danse, théâtre, géopolitique et utopie.
La danse, un langage universel :
Nous pouvons découper cette œuvre en trois parties distinctes : le discours politique, la démarche chorégraphique et l’universalité de la parole du corps. Elles se distinguent par le changement de coiffure de Yalda Younès tout d’abord coiffée d’un chignon, ensuite d’une queue de cheval pour finalement finir avec les cheveux complètement détachés, comme une virgule dans la composition. Ces trois étapes se répartissent sur deux espaces : le pupitre et l’espace délimité au centre du plateau.
Dans une salle nue, sombre, une carte géographique raturée de type colonial est illuminée. Elle présente une partie zoomée du monde méditerranéen : celle du Proche-Orient. Le spectacle débute par une conférence de presse. Surplombant leurs pupitres placés à gauche et à droite de cette carte, un homme et une femme annoncent la paix et la réunification de deux peuples. Même s’ils ne sont pas nommés on devine qu’il s’agit d’Israël et des territoires palestiniens. La femme s’exprime en arabe et l’homme nous traduit ses propos. Le discours porte sur un projet construit et approuvé mais, malgré le ton grave, les paroles deviennent inadaptées et de plus en plus délirantes. On parle par exemple de diviser la capitale en quatre sur le modèle Berlinois de l’après-guerre, ou encore de renommer le Mur de la Honte « le Mur de la Fierté ». Soudain, Yalda Younès propose de s’exprimer plus clairement et s’engage dans un flamenco à la fois brut et émouvant reflétant ainsi l’énergie de son discours par le frottement des paumes de ses mains, le balancement de ses bras en avant et des mouvements circulaires du corps propres au flamenco. Gaspard Delanoë quand à lui, nous interprète les phrases chorégraphiques effectuées par la danseuse comme la recette typique de ce nouvel état, quand il ne l’imite pas en s’engageant dans une reproduction humoristique peu compréhensible, les deux danseurs réalisant une danse traditionnelle pour le moins saugrenue. Les artistes s‘allongent alors l’un et l’autre sur le sol, annonçant ainsi aux spectateurs l‘ épilogue d‘un spectacle étonnant.
Pour aller plus loin on pourrait se poser les questions suivantes : qu’apportent les mots et les mouvements de danse à notre réflexion personnelle, ainsi que sur nos modes de communication ? Le manque de cohérence dans le discours est-il un miroir de notre société actuelle ? Et quel lien peut-on établir entre la politique et le monde de l’art ?
Articles sur Je suis venue :
http://www.lecarre-lescolonnes.fr/site.php?rub=2&docId=218385 link
http://alpiquillo.over-blog.com/article-je-suis-venue-57306773.html link
Interview de Gaspard Delanoë :
http://maisonfoliemons.be/Je-suis-venue-interview-de-Gaspard link
Article sur Yalda Younès :
http://www.flamenco-culture.com/artiste.html?art_id=57 link
Programme du Festival des souris, des hommes :
http://www.lecarre-lescolonnes.fr/site.php?rub=2 link
Article réalisé par Mélissa Haudiquert, Emilie Lecellier et Tiphaine Marquèze.