Le "krinomen" est un débat critique qui regroupe les étudiants d'Arts du spectacle (théâtre et danse) de l'Université Bordeaux Montaigne, de la Licence 1 au Master 2. Ce blog constitue un support d'informations sur les spectacles vus pendant l'année, ainsi que le lieu de publication d'une partie des travaux réalisés en TD de critique (critiques de spectacles, entretiens...).
Spectacle présenté au GLOB Théâtre entre le 9 et le 19 novembre 2011
(c) Guy Labadens
Quartett est une pièce écrite par Heiner Müller, auteur, dramaturge, directeur de théâtre allemand du XXème siècle. Ses œuvres sont construites à partir de l’actualité économique et sociale en Allemagne de l’Est pendant l’après guerre. Il a aussi travaillé sur des réécritures telles que Hamlet Machine d’après Shakespeare, ou encore des œuvres inspirées d’Homère, Sophocle, Laclos.
La mise en scène de Quartett est signée par Jean-Luc Ollivier, scénographe et metteur en scène français. Il travaille majoritairement sur des textes contemporains avec la Compagnie le GLOB située à Bordeaux. Ses spectacles sont un croisement entre les arts du théâtre, de la danse, les arts plastiques, et les technologies numériques. Il cherche une véritable confrontation et proximité avec le public. Le langage du corps et de l’image tiennent une grande place dans ses mises en scène.
Quartett de Heiner Müller est une histoire à quatre voix, pour seulement deux acteurs. La pièce reprend la trame des Liaisons dangereuses de Laclos, mais uniquement jouée par les deux manipulateurs : Merteuil la libertine et Valmont le séducteur. Merteuil joue le rôle de la jeune nièce vierge, Valmont endosse celui de Tourvel, la dévote mariée et Merteuil remplace alors Valmont lui-même. Tous deux se livrent alors à un jeu de séduction et de faux semblants à travers leurs personnages jusqu’à ce que Merteuil empoisonne Valmont.
En ce qui concerne la scénographie de Jean-Luc Ollivier, on entre dans un cube noir dont deux côtés sont réservés aux spectateurs qui se font face sur deux rangées de chaque côté. Les comédiens utilisent cet espace et passent derrière le public à plusieurs reprises. Nous sommes donc dans un rapport bi-frontal très intime du fait de l’espace très réduit.
Sur les deux autres côtés du cube ainsi que sur le sol sont projetées des vidéos : le début du texte lorsque le spectateur arrive, puis des images d’un corps féminin filmé au plus près de la peau, parfois déshabillé par une main d’homme, quelques images également du visage des deux acteurs et d’une colonie d’insectes (parce qu’elles sont dirigées par les femelles ?), puis la fin du texte à la fin de la pièce. Les trois projections ne sont jamais différentes sur les trois parois et sont en noir et blanc. Elles éclairent également les acteurs d’une lumière crue et mouvante.
Les costumes ont aussi leur importance : alors que celui de Valmont est moderne et sobre - costume noir, chemise blanche et cravate noire -, Merteuil porte corset, bas, jupon, talons, crinoline et lourde robe qu’elle revêt puis enlève tout au long du spectacle. La pièce est souvent dérangeante, la bi-frontalité renvoie toujours le spectateur à sa position inconfortable de voyeur face à deux personnages qui nous jettent au visage leur désir, leur plaisir, de façon parfois violente. Jean-Luc Ollivier le dit lui-même :
« Je monte aujourd’hui Quartett.
[…]
Parce que ce n’est ni joli, ni plaisant.
Ni aimable. »
(c) Guy Labadens
Liens :
http://www.cie-le-glob.fr/pro/Quartett%20dossier%20fin%202010.pdf
Des questions pour aller plus loin :
Comment la vidéo s’intègre-t-elle dans le dispositif scénographique ? Dans la relation entre les deux personnages ?
Ici, c’est bien la femme, son corps, son image, son identité et sa multiplicité qui sont au centre de la pièce, mais aussi la question du genre et des rapports homme-femme. Comment l’amour et la question du genre sont-ils traités dans la mise en scène ?
Article réalisé par Juliette Morin, Anne Moisset et Florent Tournier.