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10 février 2012 5 10 /02 /février /2012 18:31

« Essayer d'ouvrir les gens vers un ailleurs »
 Entretien avec Samuel Burguière, Les Ogres de Barback


 

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Les Ogres de Barback est un groupe de musique formé par quatre frères et sœurs en 1994. Le groupe tourne actuellement avec leur nouveau spectacle jusqu'à la fin de l'année.

 

 

 

 

 

                             © Dominique Houcmant


Vous tournez actuellement avec votre nouveau spectacle, suite à votre 11ème album Comment je suis devenu voyageur. Cet album laisse apparaître beaucoup de chansons aux inspirations mondiales, tant par les langues que les musiques. On a donc parfois plus l'impression que c'est une invitation au voyage, voire un voyage, plus que vous qui racontez comment vous êtes devenu voyageur.

Ce sont un peu les deux. Nous apprenons beaucoup pendant nos voyages, ce qui se ressent sur cet album. C'est pour cela que nous avons donné ce nom au disque. Quand on l'a écrit et enregistré, on parlait beaucoup des gens du voyage dans les médias. C'était durant l'été 2010, à un moment où le gouvernement voulait expulser tous les roms et l'on a souhaité, à travers ces chansons, adresser une pensée à ce peuple que l'on admire et que l'on aime beaucoup par leur musique, leur façon d'être et leur culture. Puis, il est vrai que nous avons aussi voulu inviter les auditeurs au voyage. Nous voulons essayer, autant avec cet album qu'avec ceux pour les enfants - La pittoresque histoire de Pitt'Ocha et Pitt'Ocha au pays des mille collines - que les gens s'ouvrent plus sur le monde, découvrent des civilisations et qu'ils aillent voir ce qu'il peut se passer ailleurs qu'autour d'eux. Selon nous, la musique est une des meilleures solutions pour oublier les frontières. Nous avons remarqué qu'en France, il se passe un étrange phénomène de repli sur soi-même, par rapport à d'autres cultures. Par exemple, avec les gens du voyage, mais pas qu'eux, il faut s'ouvrir et les découvrir. Avec nos albums, nous espérons servir à cela, ouvrir les gens vers de nouvelles cultures et d'autres horizons. En ramenant des instruments de pays étrangers, c'est une manière de faire découvrir aux gens de nouveaux sons qui viennent d'ailleurs. Depuis que l'on voyage, nous avons oublié les frontières et, de cette manière, nous avons énormément appris. C'est un peu le message caché de notre musique : l'ouverture vers les autres à travers nos chansons et les ambiances des albums. Nous voulons essayer d'ouvrir les gens, à notre niveau et avec les moyens que l'on a, évidemment, comme une petite participation.


Cet album semble être un bilan de votre carrière avec des titres qui rappellent vos débuts (ex : L'ennui et le jour, quant au choix des instruments) et d'autres aux influences mondiales. Peut-on voir cet album comme une synthèse de votre carrière ?

Oui, un peu. Quand on a fait cet album, nous nous sommes dit que l'on allait revenir aux sons des premiers albums, notamment sur l'instrumentalisation, où il y avait une véritable volonté et envie, pour certaines chansons, de revenir à ce que nous faisions à nos débuts. Nous ne voulions pas rajouter d'orchestration ou des cordes comme nous avions pu le faire sur le précédent, Du simple au néant, où nous ne nous étions posés aucune contrainte, sans hésiter à faire de gros arrangements. Nous voulions revenir à la base avec un son très acoustique, brut et sans effets.
Et puis, malgré tout, avec les voyages que nous avons fais, la musique du monde que l'on découvre au fur et à mesure de notre carrière, des instruments de musique que nous ramenons, nous n'avons pas pu nous empêcher d'ajouter des sons que nous avons découverts. Sur cet album d'ailleurs, l'auditeur peut entendre l'utilisation d'un « duduk » ou encore des voix polyphoniques qui sont des procédés musicaux que nous ne connaissions pas. Cet album est un clin d'œil à tout ceux que l'on rencontre, alterné avec un retour vers des ambiances acoustiques, au niveau du son en général.


Comment se déroule le processus du passage de l'album à la scène ? Quelles sont les démarches pour créer un spectacle ?

C'est une période, malgré tout, assez longue. Toutes les idées à propos du spectacle, que cela concerne les décors ou la mise en scène, sont dans nos têtes depuis longtemps. Malgré cela, nous sommes spécialistes de la grande vitesse : les idées murissent en nous et le jour où nous devons créer concrètement le spectacle, mettre en œuvre les idées que nous avons tous eues - pas seulement nous, les musiciens, mais toute l'équipe artistique - nous allons très vite. Ce passage est donc un mélange entre réflexion et rapidité. Tout se fait en quelques mois. Il ne nous faut pas non plus beaucoup d'entrainement avant la tournée. Justement, à l'opposé du théâtre où il faut un certain nombre de répétitions, nos spectacles nécessitent plus de la préparation, ne serait-ce que pour le décor afin de s'assurer qu'il n'y ait aucun danger. Lorsque que ce  travail de construction est fait, nous n'avons pas le besoin de répéter. Le spectacle va se construire et évoluer au fur et à mesure des concerts. Nous n'avons pas la nécessité de faire une ou des résidences dans un certain lieu pour « caler » et mettre au point le spectacle. C'est une période très rapide car les idées murissent en pré-création. Par exemple, nous savons déjà qu'en 2013 nous tournerons avec un spectacle pour les enfants, sans savoir pour l'instant comment sera le décor. Pour 2014 nous avons le projet de faire une tournée sous un chapiteau sur lequel on se pose beaucoup de questions, notamment sur la disposition du public: doit-on fait un spectacle circulaire ? Le public sera t-il debout ou assis ? Faut-il un décor ou non ?
Ensuite, nous ne travaillons avec personne du corps théâtral. Nous créons tout nous-même, sans metteur en scène. Bien sur, nous avons des regards extérieurs, par exemple les personnes qui ont fait le décor. Ils sont venus nous voir lors d'un spectacle pour nous donner leur avis au bout de trois mois de tournée et nous dire ce qu'il fallait améliorer. Nous ne souhaitons pas faire un spectacle tramant une histoire du début à la fin mais plutôt dégager une ambiance. Pour celui-là, Comment je suis devenu voyageur, nous sommes partis autour du tri-postal, qui est une idée que nous avions depuis quelque temps. Nous essayons de créer une ambiance autour de ce choix, ce qui ne nous empêche pas de sortir complétement de cela à certains moments du concert et puis, plus tard,  d'y revenir. Nous ne nous donnons aucune contrainte là-dessus. Nous ne voulons pas enfermer le public là dedans, leur imposer ce choix mais qu'il ressente ce autour de quoi le spectacle tourne, avec ce fil conducteur. Il ne faut pas oublier que le public est là pour assister à un concert avant tout. C'est une chose à doser : si nous leur parlons de lettre tout le temps, ils vont se lasser, mais si on oublie de l'évoquer, ils vont délaisser le thème du spectacle. Tous ces dosages se trouvent au fur et à mesure des concerts. On a commencé la tournée au mois de mars et on change encore des choses dans les spectacle aujourd'hui. Par exemple, après des mois de tournée, nous venons juste de nous rendre compte qu'une partie du décor ne sert à rien pendant toute une partie. Nous allons donc l'enlever. C'est important pour le spectateur, et comme le spectacle dure 2h20, il faut réussir à ne pas l'ennuyer.


Dans ce spectacle, on voit une grande part laissée à la mise en scène. Quel est le rôle que joue cet aspect du spectacle selon vous ? Et plus précisément dans celui-là (avec des costumes de PTT, la scénographie, les acrobates...)

Nous changeons souvent de type de spectacle puisque, comme cela fait dix sept ans que l'on existe et qu'il nous reste encore beaucoup de choses à explorer, nous essayons de ne jamais nous ennuyer, de toujours  rebondir et de faire des nouvelles découvertes. Avec un tel spectacle, où nous avons une imposante scénographie, cela permet de se lancer des défis. Mais rien ne nous empêche de revenir à des spectacles plus simples avec moins de décors comme on l'avait fait l'année dernière, avec le concert Stéréo Pirate. Le fait de faire un spectacle de cette ampleur et de tourner dans de grandes salles, puis de passer à des concerts plus minimalistes ou sous chapiteau, nous permet d'être motivés et de le rester à chacun des spectacles. Si nous faisions toujours les mêmes types de concerts, ce ne serait pas intéressant, autant pour le public que pour nous. Il y a des gens qui viennent nous voir de spectacle en spectacle, il faut qu'ils assistent à de nouveaux concerts à chaque fois.
La seconde raison s'explique par le fait que nous avons commencé notre carrière dans les festivals d'art et de théâtre de rue, notamment celui d'Aurillac. Ce sont des endroits où nous nous rendions tous les ans jusqu'à il y a peu de temps. Dans ces lieux, nous avons rencontré beaucoup de compagnies de rue. Le fait d'avoir un décor nous rappelle un peu cette atmosphère de théâtre et de cette époque. D'autant plus avec cette scénographie qui est fait par des gens qui travaillaient, et travaillent encore, pour certains, avec une compagnie de théâtre de rue que nous apprécions beaucoup, le Royal De Luxe. Nous avons fait appel à eux parce qu'il y a une ingéniosité dans leur façon de faire des décors qui peuvent et doivent se monter et se démonter très rapidement. Il nous faut un décor pratique car il faut que nous enchainions tous les jours, ou presque, dans une nouvelle ville. Pour les costumes, c'est la même chose. C'est la première fois que nous en avons sur scène, cela nous rappelle aussi ces festivals. La scénographie et la mise en scène sont donc aussi un hommage à cette période et à ces différentes troupes que nous avons rencontrées.


Du fait de cette « théâtralisation » des spectacles, on ne peut pas se contenter du terme de concert. Est-il plus juste de parler de spectacle, voire même de théâtre ?

Justement, peut-être pas puisque, comme je disais, c'est une ambiance plutôt qu'une histoire. Nous ne pouvons pas vraiment dire que nous faisons du théâtre. Nous ne nous considérons, en plus, pas bons en tant que comédiens. Ce sont vraiment des ambiances que l'on souhaite dégager. Cela n'exclut pas que, peut-être, nous en ferons plus tard, ou essayerons d'en faire, puisque, comme je l'ai dit, nous avons pour projet de faire un spectacle pour enfants où il y aura probablement une partie plus théâtrale, qui se ressentira plus que dans le spectacle actuel. Mais, pour l'heure, nous ne pouvons pas avoir la prétention de dire que nous faisons du théâtre.


 

Entretien réalisé par Pierre RAUTUREAU

Relu et amendé par Samuel Burguière

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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 07:54

 

 

Critiquer, ou oser parler en son nom

 

 

 

Il y a trois ans, je suis passée de l'écriture d'analyse théâtrale du Lycée, à l'exercice de la critique proposé par l'université. Ce fut une bascule très difficile car je passais d'une analyse objective, à une prise de position et une écriture plus pointue, plus incisive. Oser écrire "je" et mettre en avant mes interprétations me paraissait inapproprié. Pour moi, ce qui était intéressant lorsqu'on rendait compte d'un spectacle, c'était d'en parler assez pour en donner une idée précise mais pas trop pour laisser le jugement du lecteur libre.

Apprivoiser cette pratique ne fut pas très agréable car elle provoque souvent des remises en question, écrire sur un spectacle, c'est aussi approfondir les réflexions sur sa pratique de comédien, de metteur en scène (puisque nous ne sommes pas forcément tous des critiques en herbe à l'université) et lorsqu'on n'arrive pas à comprendre ni à écrire sur le spectacle qu'on doit traiter, un grand vide nous envahit. Mais en prenant du recul, on se rend compte de ce que nous a apporté cet exercice et de quelle manière notre regard change vis à vis de l'écriture et des représentations théâtrales.

 

 

J'ai toujours vu les analyses, critiques, dissertations (comme celle-ci par exemple) comme des exercices contraignants qui me demandent beaucoup d'effort de mise en route. Écrire n'est pas ce que je préfère, je n'ai jamais tenu de journal intime et, soit dit en passant, je trouve ridicule qu'on nous oblige à tenir un carnet de bord dans certaines matières. Pour le coup je ne vois pas l'intérêt d'écrire pour soi, surtout lorsqu'on ne se relie jamais!

Je me suis souvent posé la question de l'utilité de mes devoirs. Certes c'est un exercice de style mais il me paraissait sans perspectives, sans enjeux. Le désir d'un critique de théâtre ou de cinéma c'est tout de même d'être lu et de provoquer des réactions, des discussions. Là, quoique j'écrive, rien ne se passe... Soit parce que la critique reste dans le domaine scolaire, soit parce qu'on considère que je n'ai pas vraiment de légitimité à juger. Lors des différents exposés menés en cours sur l'état actuel de l'activité de critique, différents articles parlaient des blogueurs comme des gens inaptes à porter un jugement, qui restent dans l'émotion et le ressenti sans prendre du recul. Mais qui réellement peut se permettre de décider que tel ou tel écrit est une critique ou une remarque insignifiante.

De plus, j'aurai tendance à me considérer plus comme une critique de l'intérieur plutôt qu'une critique de l'extérieur, car lorsqu'on pratique le théâtre et qu'on va voir un spectacle, on ne peut s'empêcher d'essayer d'entrer dans la démarche de création, dans l'imagination de ce qu'ont pu être les étapes de travail pour arriver à ce résultat. Or, qui dit critique de l'intérieur dit rapports, échanges avec les artistes mais ils ne liront vraisemblablement jamais nos critiques. Et quand bien même ils les liraient, quel poids leur accorderaient-ils? Je ne suis même pas sûre que tous les artistes prennent en compte les papiers critiques qui sont écrits sur leur travail. On remarque très bien dans divers dossiers de production, que les articles joints sont toujours élogieux. Et je les comprends, car il y aura toujours quelque chose à redire sur un spectacle, étant donné que c'est vivant, que ça bouge. Quelque chose de parfaitement travaillé peut se perdre d'une représentation à l'autre. Contrairement au cinéma où une fois que le film est terminé, retravaillé, c'est un objet fini. Si on prend en compte l'avis et l'interprétation de chaque spectateur, on avance surement moins efficacement dans une création artistique. Mais peut-être que la prise en considération par les artistes de certains écrits plus critiques et constructifs pourrait être intéressante à mettre en avant car elle témoignerait d'une certaine complexité, et permettrait de faire comprendre que même lorsqu'on est créateur, on n'est jamais sûr de rien.

Je me suis souvent demandé, si je ne me mentais pas à croire que ce que j'écrivais était sans aucun doute des interprétations et des avis personnels. Car en y réfléchissant, simplement dans le cadre de notre promotion, il y a des spectacles qui font l'unanimité et d'autres qui sont rejetés presque par principe (metteur en scène, compagnie ou texte qui ne nous plait pas d'office). J'en suis venue à me dire que nous étions malgré nous "formatés" car nous côtoyions régulièrement les mêmes lieux, les mêmes personnes et que notre discours fini par se fondre dans celui des autres sans qu'on s'en rende compte. Ne soyons pas paranoïaques pour autant, il serait également bête de toujours être en contradiction avec les autres sous le seul prétexte de ne pas se sentir influençable!

 

 

Consciente de mon inefficacité à faire évoluer les productions artistiques par mes critiques, je leur trouve avec de la distance une utilité plus personnelle...

Coucher des mots sur le papier permet de faire un travail de mémoire, je me souviens davantage des spectacles sur lesquels j'ai écrit, auxquels j'ai réfléchi. L'écriture permet de prolonger le temps de la représentation, de s'intéresser de plus près au travail de la compagnie, à ses démarches. On quitte l'émotion, le ressenti pour aller vers l'argumentation et la réflexion. Il y a des spectacles par contre dont je n'ai pas envie de parler car justement je ne veux pas quitter le domaine de la sensation. Et d'autres spectacles que j'apprends à aimer à postériori, en écrivant et en faisant des recherches. Je comprends des éléments qui ne m'étaient même pas parvenus sensiblement pendant le spectacle. Si je n'écris pas sur un spectacle et qu'on en reparle plusieurs années après, même si je l'ai adoré j'ai tendance à répondre simplement "Ah oui je me souviens, c'était bien!", il ne me reste plus qu'un vague souvenir.

Le travail de la critique commence dès les discussions avec les gens à la sortie ou quelques jours après le spectacle, au début on ne sait pas trop quoi dire puis on prend le temps de réfléchir, on entend des bribes de conversation, on réagit à des propos de manière impulsive comme « Ah non! C'était trop... trop beau ça.. trop... », puis petit à petit on se forge une idée et des arguments pour la défendre. Le travail continue lorsqu'on rentre chez soi et qu'on nous pose la question « Alors t'as passé une bonne soirée? C'était quoi comme spectacle? ». On est alors obligé de faire une description très rapide, de la scénographie, du sujet, des enjeux principaux du spectacle. Je m'oblige à rester simple dans mon expression car j'écris pour donner envie d'aller voir. Mine de rien, ce travail permet d'aller à l'essentiel et de remettre nos idées en ordre. Quand j'écris, je me fais toujours relire et la question que je pose sans arrêt c'est "Alors tu comprends quelque chose?" puis il m'arrive de montrer des images du spectacle à cette personne et de lui demander si c'est ce qu'elle imaginait.

La critique me permet d'approfondir mes propres réflexions, théoriser, schématiser et coucher les mots sur le papier m'aide à prendre du recul par rapport aussi à ce que j'ai envie de dire lorsque je suis sur scène et comment j'ai envie de le dire. C'est bien d'être exigeant avec les spectacles qu'on va voir mais il faut aussi pouvoir l'être avec son propre travail, et en général, on devient vite plus respectueux des propositions artistiques qui nous sont faites.

 

 

La seule difficulté pour moi à écrire une critique c'est simplement de m'y mettre, j'écris "un ours" en une seule fois que je retravaille ensuite. C'est le cas aussi pour cette dissertation mais je suis satisfaite une fois le travail terminé, je me sens légère (ça c'est parce que j'arrive à la conclusion!). Outre le travail universitaire, je retiendrai de l'exercice de critiquer que ce n'est pas forcément négatif comme je le pensais mais que c'est un essai qui permet d'avancer aussi bien personnellement que pour l'artiste s'il prend la peine de le lire. Le tout c'est d'être constructif.

 

 

 

 

 

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10 septembre 2011 6 10 /09 /septembre /2011 07:44

 

 

Entretien avec Muriel Barra, fondatrice avec Olivier Gerbeaud de la Compagnie Mutine, compagnie pluridisciplinaire implantée à Bordeaux depuis 1998.

 

 

Pouvez vous me parler de votre parcours, de votre formation?

J'ai commencé la danse classique à six ans et à neuf la danse contemporaine. J'ai eu la chance d'avoir une professeur qui organisait beaucoup de stages avec des danseurs de l'Opéra de Paris, ou avec un danseur de Carolyn Carlson. Et ça jusqu'au bac. Après le bac je suis partie à Toulouse et j'ai intégré la compagnie Klassmvte sous la direction de Pascal Delhay. Pascal Delhay est un chorégraphe autodidacte qui a seulement fait un stage avec Carolyn Carlson qui lui a conseillé de se lancer. J'ai donc très vite été intermittente mais au bout d'une dizaine d'années j'ai eu envie de dire des choses par moi même. Je suis donc partie à Bordeaux, j'ai obtenu mon diplôme d'état de danse, j'ai rencontré des gens comme Olivier Gerbeaud, le groupe l'Abracadaband... Et Mutine s'est développée, c'était au départ une compagnie de musique et danse.

 

 

Mutine réunit différents arts (théâtre, musique, danse, vidéo, chant...), qu'elle méthode de travail adoptez-vous? Par exemple pour le spectacle T'es où?

 

T'es où? est peut-être le spectacle le plus représentatif de la compagnie Mutine. Il faut que je fasse attention lorsqu'on joue ce spectacle parce qu'il me faut bien deux jours pour redescendre. C'est un ensemble

de pièces courtes sur le format d'une chanson, on en a quarante de prêtes mais seulement vingt sont jouées dans le spectacle selon les lieux, et les envies du moment. On travaille tous ensemble.

musiciens, danseurs, comédiens et ce qui est intéressant c'est d'aller là où on n'a pas l'habitude. Avec Beatriz Gallizo nous avons fait quinze ans de piano, on sait au moins lire une partition! Mais lorsqu'on travaille avec des comédiens comme Juillette Plumecocq-Mech c'est très difficile de ne pas se laisser "manger" par leur énergie et de prendre le plateau derrière eux.

 

Mutine c'est le mélange des arts mais également mélanges des expériences. J'ai lu sur votre site que plus de cinquante personnes ont contribué à faire vivre Mutine, en plus de faire le lien entre les différents arts, vous le faites aussi entre les artistes, vous êtes à l'écoute de ce qu'il se passe ailleurs et vous le partagez...

 

Oui, en 2004 par exemple, le spectacle Quatuors ou l'épreuve des corps était la mise en scène par Jean-Marie Broucaret de textes commandés à Jean Philippe Ibos et Dominique Unternehr. Ce spectacle était tellement violent que je me suis blessée au cours de la création. J'ai donc fini d'apprendre mon métier aux côtés de Jean-Marie Broucaret. Puis je devais jouer par la suite dans La chambre des visionsde Jean-Luc Ollivier, mais je ne savais pas si je serais rétablie. Il m'a alors proposé d'être assistante à la mise en scène si jamais je ne pouvais danser, puis finalement on a créé un personnage bancal qui correspondait à mon état puisque je ne pouvais marcher sans boiter.

 

 

Théâtre dansé ou danse théâtralisée, quel est votre rapport au corps dans la création d'un spectacle? La parole naît-elle du mouvement du corps ou est-ce elle qui engendre le mouvement?

Je ne crois pas avoir un travail systématique, je travaille beaucoup à l'intuition, il y a des textes sur lesquels je vais réagir plus sur la musicalité, puis ça dépend si je dis le texte ou si je danse pendant que quelqu'un d'autre le dit, ou bien si le texte est un support de la danse. Il y a plusieurs façons de se baser sur un texte. Si c'est un texte écrit d'un auteur X et qu'il est le support de la danse, soit je prends des grands thèmes et je vais aller chercher dans le corps ce qu'ils me renvoient. Dans les souliers rouges par exemple il y a l'autonomie, l'appui. Après, je vais fouiller dans le vocabulaire dansé avec des improvisations qui me permettent de creuser par rapport à ce que je ressens de ce qu'à voulu dire l'auteur. Essentiellement, quand le texte est dit au plateau et que ce n'est pas moi qui le dis, le rapport que j'ai est souvent un rapport médical, parfois j'attrape des mots qui correspondent à des parties de corps. Tout d'un coup par exemple, la voix se veloute, et peut être que le corps va se velouter à son tour,c'est un travail basé sur les organes des sens. Là aussi je me rappelle d'un travail sur un des textes de Marguerite Duras extrêmement scandé, très métré, du coup on rentre dans une répétitivité, dans ce cas là c'est un processus d'écriture chorégraphique. Je n'ai pas de "systématique" car suivant les textes je ne crois pas qu'on travaille de la même façon. Un texte poétique ne se travaille pas de la même manière, pour moi, qu'une épopée, on ne travaille pas pareil sur un texte de Ghérasim luca ou sur un conte. Par contre le texte est une grande source de recherche, je peux difficilement danser sans penser, c'est à dire que quand je danse, je me vois au minimum dans des paysages, dans des couleurs avec différentes textures sous les pieds. Il est aussi possible d'être habité par un bout de phrase, par un mot essentiel. La danse n'est pas écrite de A à Z en fait, il y a des parties très écrites et après je décide ce que j'en fais, soit je me dis à tel endroit je l'ouvre, et arrive ce qui arrive, et là c'est ce qui vient le soir du spectacle, en définissant une texture de corps et une émotion bien sûr. Les parties très écrites ont un début, une fin, et entre elles il y a un temps complètement ouvert et après lequel je vais enchaîner la deuxième partie écrite. C'est vraiment un mélange des deux et c'est ce qui fait que la danse d'un interprète (quand je fais travailler quelqu'un) est vraiment singulière. Parce que la personne est à la fois dans mon écriture et dans son être à elle, dans son être profond. C'est à dire que le travail d'improvisation va lui permettre de faire de la chorégraphie son propre magma, et que personne d'autre qu'elle même ne pourra la danser à l'identique. L'appropriation de l'interprète est très forte et en même temps, si il y a besoin de se retrouver dans un unisson c'est possible puisque le travail d'écriture a été fait.

 

Ce que vous venez de dire par rapport à l'écriture et à l'improvisation ne se remarque pas du tout dans vos spectacles, dans votre travail tout est fluide et forme un ensemble...

Je pense que c'est ce qui caractérise mon travail, c'est que c'est écrit comme ça, je ne peux pas faire autrement, je m'ennuie

profondément si j'ai à danser une danse qui est écrite, point. Par contre j'ai fait beaucoup de performances improvisées mais ça ne me rempli pas non plus. Puis c'est une façon de respecter la personne en face et d'enrichir mon écriture, c'est à dire que pendant les temps d'improvisation je vais pouvoir peut-être me mettre à écrire une partie.

 

Espace de liberté que représente l'improvisation et qui est paradoxalement dur à prendre car on n'a pas forcément de point d'appui. Dans des cours de danse contemporaine il arrive que le professeur mette une musique et c'est à nous d'improviser. Dans ces moments là, on a parfois la sensation d'être un peu "jeté dans le vide". Je sais que vous organisez et que vous proposez des stages, comment amenez vous l'improvisation?

L'année passée, et je vais reprendre ça l'année prochaine, je faisais tous les premiers samedi de chaque mois trois heures de travail de recherche avec les gens qui voulaient. Et les points de départ étaient des endroits du corps, par exemple on peut travailler sur l'œil, dès qu'on a quelque chose, on pense ailleurs et plus sur soi. On déplace la pression.

La danse contemporaine a beaucoup gagné par rapport aux années 80 où certains chorégraphes étaient extrêmement didactiques et froids, les danseurs étaient là pour exécuter puis il y avait aussi des gens avec un imaginaire complètement débordant comme Philippe Découflé ou Maguy Marin. Je crois que plus ça va et moins l'interprète est une machine en danse contemporaine.

 

Contrairement aux danseurs classiques qui restent quand même dans un travail d'exécution, dans les répétitions notamment, lorsqu'un danseur n'est pas concerné par ce qu'il se passe sur le plateau, il s'assoit et discute très naturellement...

Ils ne sont pas dans une écoute comme les comédiens, qui, lorsqu'ils sont en répétition, et qu'un d'entre eux fait un monologue, les autres le regardent. En danse soit il y a du tutti (tous ensemble) soit il y a des duo des solos, et les autres ne sont pas convoqués aux répétitions. Ça vient aussi du fait que corporellement, si tu t'es échauffé avant et que tu regardes les autres pendant deux heures il faut pouvoir recommencer après! Et c'est très fatiguant ça. C'est ce que je trouve le plus dur quand on travaille avec d'autres arts, nous (danseurs), nous sommes obligés d'avoir un outil "prêt à" et nous ne sommes pas dans les mêmes temps qu'un musicien qui va pouvoir passer trois heures sur son instrument sans que ça le dérange. Moi, toute seule sur un solo, au bout de deux heures, je suis épuisée! T'es où? est pour moi une réussite aussi parce qu'on a travaillé sur des pièces courtes, ça convenait aussi au rythme du danseur, c'est à dire que tu peux travailler deux heures sur une pièce courte de trois minutes mais après il y a une autre pièce qui arrive et tu n'es pas forcément concerné, tu peux vraiment équilibrer ton temps de travail.

 

Est-ce qu'il y a des formations qui existent aujourd'hui pour appréhender le théâtre comme vous le pratiquez?

Je ne sais pas... Peut être que ça existe mais je n'en ai pas entendu parlé, je crois que ce qu'on fait ça nous ressemble. Mais on essaie de monter un stage de quinze jours en Septembre qui est ouvert aux comédiens, musiciens, danseurs avec Juliette Plumecocq-Mech, Olivier Gerbeaud, Marianne Mazeau pour la technique vocale et moi. Peut-être que quand on sera vieux on montera une école mais pour l'instant, on aime transmettre dans une recherche de création. Aujourd'hui, on a besoin d'aller dans tous les "possibles possibles" pour faire le tour de nos questions. On aime beaucoup transmettre et il y a des temps forts de transmission avec des gens qui sont en cours d'apprentissage mai je n'ai pas la sensation de savoir, du tout! Donner si mais plus dans le partage d'une recherche et pas comme une vérité, comme quelque chose d'établi. Puis personne ici ne fonctionne comme ça. On a des doutes tout le temps et s'établir en école à la française ce serait très gênant par rapport à nous. Par contre faire partie d'une équipe qui recherche sur le croisement des arts moi ça m'intéresse, comme à l'Estba où j'interviens, j'ai la chance de démarrer et de les voir au plateau derrière, de voir ce qui s'en va du corps quand il y a la parole qui arrive ou le trac.

 

On sent bien quand on travaille avec d'autres membres de la compagnie comme avec Tony Leite qui fait aussi partie de l'Atelier de Mécanique Générale Contemporaine, qu'il est en recherche avec nous, il arrive avec des outils mais on compose ensemble, il n'y a pas la sensation de l'enseignement.

Parce qu'il y a quelque chose qui inclut aussi le fait qu'il n'y a pas de niveau particulier à atteindre pour pratiquer. C'est à dire qu'à n'importe quel niveau et à n'importe quel âge, on peut être sur cette recherche là. Et c'est ce à quoi je m'attaque pour la prochaine création. On est vrai. On ne demande pas à un enfant acteur au cinéma d'être un comédien accompli et il y a des enfants au cinéma qui sont hallucinants parce qu'ils ont été très bien dirigés, très bien choisis et puis qu'il y a quelque chose qui se passe, l'enfant il a comprit, il a senti. Mais ce déclic là, (alors là c'est une pensée humaniste) on peut le faire surgir de chacun de nous. Parce qu'on est tous incarnés, on a tous une histoire, on vient de quelque part. Et le métier de celui qui est en face c'est de faire émerger.

 

Jean-Luc Ollivier, avec qui vous travaillez beaucoup, a cette capacité de faire émerger où d'emmener ailleurs les comédiens qu'il dirige, et de ce point de vue là, ce métier de metteur en scène me paraît délicat et très difficile...

Oui et en même temps c'est très passionnant. Je n'arrive pas, pour ma part, à faire le choix entre les deux. Encore sur le prochain projet je ne devais pas être au plateau et je pense que j'y serais. Parce que les deux me sont nécessaires.

 

Ce n'est pas difficile de trouver les mots justes pour faire avancer quelqu'un sur un plateau sans le blesser?

C'est sur que c'est ingrat comme métier mais dans le milieu professionnel, les comédiens sont capables d'entendre, de remettre leur proposition dans la poche et de t'en ressortir une autre. Beatriz Gallizo a cette grande qualité, elle n'a aucune attache à la proposition qu'elle va faire, c'est très espagnol ça je pense! C'est un grand professionnalisme plus que de l'humilité et on gagne à se détacher de ce qu'on joue, de la proposition ou de la danse même, une danse par exemple est peut-être très belle mais elle ne va pas du tout à cet endroit là, puis elle n'ira pas du tout dans ce spectacle, donc poubelle c'est pas grave. Ce n'est pas grave, c'est du travail acquis et c'est très important de ne pas s'attacher à la matière. De toute façon si on veut mener un projet à bien il faut être au service du bateau.

 

Et la Cie Mutine c'est un gros bateau! Au niveau de votre investissement personnel, qu'elle part de vous transparaît dans les spectacles?

Moi j'y met toute ma vie. Je crois que surtout quand on est auteur, même si on décide qu'on ne parle pas de soi, on parle de soi. Ça c'est terrible! L'idée c'est de faire les ponts entre ce qui t'est très intime et très proche et ce qui devient universel. C'est à dire que le lieu du plateau soit le lieu où ce qui te touche le plus devienne suffisamment universel pour toucher la personne en face. Parce que personne n'en a rien à faire de ta vie, que ce n'est pas l'endroit, et qu'il y a des psychanalyses pour ça (et c'est bien de les mener à côté). Il faut savoir où on se situe et ce que l'on dit. En même temps quand tu es auteur, tu dis ce que tu es. Et moi souvent je me demandais pourquoi je partais sur des thèmes, et à rebours ou pendant les temps de création et de répétition, je touchais au cœur de ce qui était extrêmement sensible pour moi à ce moment là. Après c'est mon expérience! Comme je ne prends pas l'écriture de quelqu'un, je ne fais pas comme des metteurs en scène, prendre Beckett puis prendre Koltès et même je suis sûre qu'on ne prend pas n'importe quoi chez Beckett et n'importe quoi chez Koltès! Après, là où il faut vraiment être sage c'est de ne pas... Enfin il est hors de question de s'étaler, d'ouvrir ses "tripes" pour le plaisir.

 

Y a-t-il des thèmes récurrents dans les spectacles que vous proposez?

Ce que j'observe quand même c'est que je me retrouve toujours dans des histoires de femmes, je traite beaucoup de la féminité, globalement. Le lien à la maternité, le lien à l'empêchement. Avec Frida c'était vraiment ce que tu peux et ne peux pas faire, et comment tu fais sans ou comment tu fais quand tu ne peux plus faire comme avant.

 

Tout le travail de mise en corps sur Frida avec ces robes métalliques ces corps meurtris, c'était vraiment très poignant...

On avait beaucoup travaillé sur le corps empêché. Mais tu vois c'était trois, quatre ans après mon accident. Il y a un lien soit à postériori soit en anticipation. Sauf que moi je n'avais pas envie de parler de mon talon d'Achille! Il y a un vécu, un engagement qui est différent. Pour l'instant je parle de ce que je connais à peu près le mieux c'est à dire de la femme. Mais je ne désespère pas de faire une pièce d'homme! Ce n'est pas encore la prochaine... Parce que le monde ce n'est pas que la femme.

 

Il y a des choses qui se font écho dans vos différents spectacles mais c'est étrange de les ressentir ailleurs, en allant voir des spectacles d'autres artistes. Je suis par exemple allée au TNT pendant le festival 30''30' et il y avait la présentation du travail d'Olivier de Sagazan, Transfiguration. Dans la scénogaphie de ce spectacle il y avait une grande plaque de métal et lorsqu'il s'est explosé contre celle-ci je me suis pris moi aussi quelque chose en pleine figure et après coup, j'ai réalisé que c'était le souvenir de Frida qui m'était revenu, comme si j'avais une mémoire corporelle qui ne demandait qu'à ressurgir et que les sensations, les émotions que l'on peut ressentir durant un spectacle sont ancrées en nous.

Il y a une mémoire kinesthésique en tout cas c'est sûr. C'est bien parce qu'il commence à dater ce spectacle, il a été crée en 2006. C'est fait pour ça, c'est à dire qu'il reste et les gens en parlent beaucoup de Frida, pourtant il a très peu tourné ce spectacle, il n'était pas du tout dans l'air du temps et il y avait une émotion qui n'était pas du tout à la mode à ce moment là.

 

Est-ce que ce serait possible pour vous de retoucher à un spectacle qui a cessé de jouer?

Oui... En tout cas on a vraiment un répertoire chez Mutine, il y a des spectacles qui tournent, par exemple dans quinze jours on joue un spectacle qui a été crée en 2000, Amarantes. Je retouche très peu ce répertoire, il bouge parce que mon corps bouge. Mais j'essaie de respecter l'auteur, de toutes façons c'est moi l'auteur! (rires) J'essaie de respecter ce qui avait voulu être dit à ce moment là. Amarantepar exemple est très proche de ce qu'il était quand il est sorti. J'aime le répertoire, j'aime re-rentrer dans des temps qui ne sont plus actuels. Je ne suis pas du tout une créatrice qui, quand on passe au spectacle suivant ne veut plus entendre parler de celui d'avant. Si on me redemande Fridadans six mois, il n'y a aucun soucis! Ça repart. Ça repart là où il était, alors, avec des aménagements, peut être qu'il y a des choses qui bougeraient mais enfin la trame, la couleur du spectacle serait absolument respectée.

 

Que pensez vous des rencontres après une représentation entre les artistes et leur public?

L'artiste est là pour dire ce qu'il a à dire dans le temps qui lui est imparti et basta! Je préfère un temps décalé, qui réactive certaines choses. On est pas là pour théoriser ce qu'on fait mais on peut quand même essayer de faire passer un peu son savoir faire, sa façon de faire. Mais après un spectacle, il n'y a rien à dire pour moi, c'est très difficile comme exercice pour nous, et pour le spectateur aussi puisqu'il est encore dans l'émotionnel, dans le ressenti.

J'ai a dire lorsque par exemple avec Le pas de la louve on est face à un public d'enfant, ils ont des questions, ils livrent des sensations, le retour est dans l'échange direct et pas d'ordre philosophique, et ça c'est tout à fait plaisant. Sinon j'évite les rencontres post-représentation, je préfère rencontrer les gens deux jours avant ou le lendemain.

 

La Cie Mutine ne propose pas de spectacles ouverts aux adultes exclusivement, pouvez-vous m'en dire plus sur Le pas de le louve et votre rapport au jeune public?

Le pas de la louve commence avec un conte, c'est l'histoire d'une petite fille qui se déroule, donc c'est quelque chose qui a un sens, un début, une fin. Et après le spectacle déconstruit cette trame, prend des bouts, amène ailleurs, il y a des moments très oniriques, des moments de combats. Le spectacle clôture par un deuxième conte, c'est l'histoire d'une vieille dame, peut-être que c'est la vie de la petite fille du premier conte, peut-être pas. Ça fait aussi partie de la façon dont les spectacles chorégraphiques sont construits, avec des digressions, des échappements... Et puis après le spectateur fait sa sauce mais effectivement, il y a des enfants qui sont déjà dans une lecture très logique et c'est important qu'ils aillent voir du théâtre.

On porte ce qu'on a été enfant quand on est adulte au plateau, et puis on estime que ça nous concerne, tout en pensant au public d'enfant, il y a des choses que je n'ai pas mises sciemment au plateau parce que c'était trop violent, ce n'est pas une censure, c'est à un moment donné se dire, attention, il va y avoir des enfants , donc il y a des choses que j'ai envie de mettre en place et d'autres pas. C'est un vrai choix parce que le spectacle est un spectacle jeune public mais quand même à partir d'un âge défini. La petite fille elle va demander au bourreau de se faire couper les pieds, ce n'est pas rien, et il y a des moments ce n'est pas la peine d'en rajouter. Mais par contre on porte cette terreur là et la sensation de grande peur ils l'ont eu . Il y a des moments où on entend « tu crois qu'elle va pouvoir se relever? », je suis simplement allongée sur le côté, il ne s'est rien passé!

Le prochain spectacle qui arrive c'est un spectacle fait de chansons, un concert pour enfants, Olivier Gerbeaud travaille sur des entretiens radiophoniques d'enfants qui donnent leurs points de vue sur le monde dans lequel ils vivent et le monde des adultes. Je pense que les adultes vont se régaler! Et les enfants aussi! Il n'y a pas une manière d'écrire la musique pour les enfants et une autre pour les adultes. Petite j'écoutais Brel et ça me parlait, il n'y a pas des notes pour les enfants et des notes pour les adultes de la même manière qu'il n'y a pas des pas pour les adultes et des pas pour les enfants. Dans le spectacle on entendra peut-être quelques enregistrements d'enfants mais ce seront deux adultes sur le plateau, qui ne joueront pas des enfants , simplement ils représenteront une entité féminine et une entité masculine. Mais sur les problématiques et les questionnements, les envies des enfants de cet âge là. En création donc la saison prochaine !

 

 

 

Propos recueillis par Pauline VALENTIN

 

 

 

 

 

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  • : Le "krinomen" est un débat critique qui regroupe les étudiants d'Arts du spectacle (théâtre et danse) de l'Université Bordeaux Montaigne, de la Licence 1 au Master 2. Ce blog constitue un support d'informations sur les spectacles vus pendant l'année, ainsi que le lieu de publication d'une partie des travaux réalisés en TD de critique (critiques de spectacles, entretiens...).
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